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Gharib Amzine, qui a disputé la Coupe du monde 1998 en France avec le Maroc, est l’entraîneur-adjoint des Lions de l’Atlas au Qatar. L’ancien joueur et entraîneur-adjoint de l’Estac se forge une carrière en or. Mais promet de revenir vivre dans sa ville de cœur.
Gharib Amzine, comment se sont passés les deux derniers mois, depuis que vous avez pris vos fonctions d’adjoint de la sélection marocaine ?
J’ai passé beaucoup de mon temps au centre national à Rabat, sans les joueurs. C’est un peu mon QG, là où sont nos bureaux. J’ai un appartement en ville. Je redécouvre Rabat, je n’y étais pas retourné depuis 2017. La ville a évolué, mais j’ai de la famille qui habite ici, ça facilite la chose. Jusqu’à ce que les joueurs arrivent à Rabat samedi, c’était beaucoup de travail de bureau, d’analyse vidéo de nos joueurs, de nos adversaires.
Pour l’instant, votre mission est conforme à ce que vous envisagiez ?
Oui. Je prends mes marques. C’est un peu la même fonction qu’à Troyes en équipe première. Le terrain me manquait un petit peu, mais là, c’est parti depuis le début de la semaine. On a rejoint le Qatar dimanche avec la plupart des joueurs, les derniers nous ont rejoints sur place. J’ai hâte que la compétition commence.
« Il y a un engouement populaire énorme. »
Quelles sont les attentes du peuple marocain pour sa sélection ?
Il y a un engouement populaire énorme. On le sent. À Rabat, en famille, dans les rues, ça ne parle que de foot ! Les gens s’identifient, le football est une bouffée d’oxygène, on ressent cette pression populaire.
Plus que vous ne l’imaginiez ?
Il y a une forte attente parce qu’on a une équipe à fort potentiel. Tout le monde attend qu’on le montre sur le terrain collectivement. Quand j’étais joueur, on ressentait cette pression, mais pas autant qu’aujourd’hui, maintenant que je suis dans le staff. Où que tu ailles, on ne te parle que de football. Surtout avant la publication de la liste…
Vous avez votre mot à dire, justement, sur cette liste ?
Oui, on l’a décidée de manière collégiale. Le staff est uni, tout le monde a eu son mot à dire. Le sélectionneur était à l’écoute de nos réflexions, c’est important pour former un groupe idéal et performer.
Il y a peu de surprises dans cette liste, hormis la sélection du jeune attaquant de Genk, El Khanouss…
C’est une surprise pour le public, pas pour nous. On le suivait depuis longtemps, il a été sélectionné avec les U23. C’est un joueur à fort potentiel. Il en parlait même pour la sélection belge, mais il a choisi le Maroc ; on est content qu’il choisisse son pays d’origine.
Quels sont les objectifs du Maroc dans cette Coupe du monde ?
Il faut être ambitieux pour rendre fier le public en passant ce premier tour. On sait que la tâche va être ardue, mais j’ai envie de dire qu’elle le sera aussi pour la Belgique, la Croatie et le Canada. On est des outsiders, à nous de faire en sorte qu’on puisse briller collectivement.
Quels enseignements avez-vous tiré des matches de préparation contre le Chili et le Paraguay ?
On a battu le Chili, fait un nul contre le Paraguay. On a eu très peu de temps pour travailler. Mais il y a eu une évolution sur ces dix jours. On sent un groupe très soudé, un état d’esprit s’est créé, les joueurs adhèrent à nos principes. On a les qualités des équipes nord-africaines, avec beaucoup de technicité, d’endurance. Mais ce qu’il faut, c’est réussir à les faire jouer ensemble, alors qu’on a très peu de temps.
Revenir à ses racines, c’est une expérience forte émotionnellement…
Oui, c’est une grande fierté. Ce n’était pas planifié, j’étais focus avec Troyes. Ce projet est tombé, ça m’a botté, c’est une fierté de représenter son pays. C’était très difficile de le refuser.
C’était difficile de refuser parce qu’il y avait cette Coupe du monde imminente ?
Sincèrement, cette Coupe du monde, c’est la cerise sur le gâteau. Je fais ma deuxième Coupe du monde, mais je suis honnête, il n’est pas question de contrat. Après, il y a un autre objectif qui est de faire une grande performance à la Coupe d’Afrique des Nations 2023 qui se déroulera en janvier 2024 en Côte d’Ivoire. L’objectif réel, c’est cette CAN.
Pour vous, c’est une nouvelle vie dans un pays qui est pourtant le vôtre…
Oui, je dois me réadapter. Le plus difficile, c’est quand même de ne pas avoir auprès de soi mes proches, mes amis. Mais je ne suis pas isolé, il y a de nouvelles rencontres qui se font. Je suis réservé, mais il faut profiter de la vie, avancer. Je sais que ça va être enrichissant.
« Deux Coupes du monde, dans ma tête, ça cause. »
Comment jugez-vous la décision prise par City group de se séparer de Bruno Irles ?
On a travaillé ensemble, et de ne pas aller au bout du projet, c’est toujours difficile. Mais connaissant Bruno, il va très bien rebondir. Est-ce que ce sera mieux sans lui, l’avenir nous le dira… Des choses ont été bien faites, j’espère qu’on va réussir à se maintenir.
Vous ne pouvez pas vous empêcher de dire « on » en parlant de l’Estac…
Oui, Troyes, j’y ai passé plus de 14 ans ; forcément, j’y suis très attaché et je sais qu’un jour, très certainement, je reviendrai vivre à Troyes. Je parle de l’homme.
Vous êtes plus attaché à Troyes qu’à l’Alsace, où vous êtes né ?
Disons qu’à Troyes, j’ai plus d’amis qu’en Alsace. Mes potes d’enfance ont quitté l’Alsace. À Troyes, j’ai plus de liens. Il y a mon amie…
À quelques heures du coup d’envoi de ce Mondial, vous vous rendez compte qu’en 1998, vous portiez le maillot de cette sélection marocaine…
Oui, je me rends compte. Je ne sais pas si ça cause sur un CV, mais dans ma tête, ça cause. Je suis heureux, même si je ne réalise pas encore. Y être allé comme joueur, y être comme adjoint, c’est super, même si je n’ai pas été sur le devant de la scène. À mon retour à Rabat, j’ai été bien accueilli. Maintenant, à nous de rendre fier le peuple marocain. »